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MinutePapillon8
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23 juin 2009

Je me souviens

Les fruits des bonheurs présents plongent indéniablement leurs racines dans le riche terreau de l'enfance. Alors que j'œuvre à l'épanouissement de nos deux jeunes pousses, je me penche sur le passé, j'en remonte la trame et comme George Perec, je me souviens.

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Je me souviens des soirs aux cristaux d'orange, du vieux lit en bois sculpté, aussi haut et molletonné que celui de la princesse au petit pois. Dans le cercle intime et ambré de ma lampe de chevet, j'écoutais les histoires qui m'étaient contées tout en gardant un oeil sur les ombres déformées des objets familiers. Je n'étais alors qu'une petite graine de lectrice plantée dans des draps de coton.
Je me souviens de mon chien Dania.
Je me souviens des mains tâchées par les mûres à l'automne.
Je me souviens d'une framboise au bout de chaque doigt, de la colle sur la paume des paumes, très
Amélie Poulain.
Je me souviens des marches de mes escaliers que je transformais en train. Je recrutais toutes les peluches et poupées de la maison pour avoir des passagers à chaque marche. Un autre souvenir d'escalier me revient souvent, plus lointain, plus confus, un souvenir de bonds géants qui me donnaient des ailes. Je crois bien avoir sauté tout l'escalier en un saut et puis il y avait ces rêves où je m'élevais jusqu'au plafond, je volais, des rêves qui frôlaient la réalité et qui me visitent encore parfois, trop rarement.
Je me souviens de vouloir faire des gâteaux toute seule au hasard des ingrédients et d'obliger ma famille (ou à défaut le chien) à les manger.
Je me souviens de vouloir planter, faire pousser, de pas savoir
Je me souviens de vouloir parler aux animaux, de pas trop y arriver.
Je me souviens chanter à tue tête.
Je me souviens des souliers vernis qui claquent et des robes à jupons qui tourbillonnent.
Je me souviens de l'odeur de mon école maternelle.
Je me souviens d'avoir changé d'école dés que quelque chose n'allait pas, de pas avoir eu trop d'amis à cette époque ou j'ai oublié.
Je me souviens avoir eu mal au ventre rien qu'à l'idée d'y aller à l'école. Je ne me souviens pas pourquoi j'en ai fait mon métier.
Je me souviens des techniques pour coûte que coûte tout avaler à la cantine ou faire comme si.
Je me souviens avoir été cruelle.
Je me souviens de la poésie du téléfilm scandinave "Dunderklunpen". Ce petit personnage animé solitaire franchissait les frontières et se retrouvait dans le monde d'êtres de chaire et de sang par une nuit de clarté, à la St Jean, pour voler les jouets d'un petit garçon qui devenaient eux aussi animés, tel que le touchant lion Pijapoix et le tendre Pataplouf.
Je me souviens du dessin animé "Le Lion et la Sorcière Blanche" qui, je l'ai découvert des années après, était une adaptation de "l'armoire magique" de C.S. Lewis, une armoire qui mène à un autre monde! J'en ai tâtés des fonds d'armoires pour y accéder, peut-être même y suis-je parvenue.
Je me souviens de l'"Oz" de Disney dans lequel Dorothy retourne au pays magique avec sa poule Bellina et y rencontre Jack Potiron et TicToc. Revoir ce film bien des années plus tard a réveillé nombre d'échos en moi. Le moindre soupir m'était familier. C'était comme retrouver un vieil ami oublié et qu'on croyait perdu.
Je me souviens du rire cristallin d'Heidi, de son enchantement constant et de ses plaisirs simples au coeur de la montagne, de ses amis Pierre, Blanchette et Pilou.
Je me souviens des chagrins répétés de Candy accompagnés par la triste complainte des violons lancinants.
Je me souviens de la très coquine Georgie, du beau capitaine Flam, de Bouba, Maya, Rémi, Nils, Télémaque, sport Billy, des Fraggles et bien d'autres.
Je me souviens avoir plus souvent regardé la télé qu'avoir partagé jeux et discussions en famille mais je ne m'en plains pas, ça peuple aussi l'imaginaire.
Je me souviens avoir toujours vécu dans des lieux habités par les chats, vieux chats, jeunes chats, roux, tigrés, gris-bleus, écrasés, disparus, réapparus.
Je me souviens des bains chauds brûlants du samedi soir qui lavaient tous les tracas de la semaine et de ma mère qui préparait des tournedos ces années de faste! C'était fête!
Je me souviens de dimanches gris salis vomis.
Je me souviens de la chambre-placard de mon frère, son antre magique, pas de fenêtre mais un poster la représentant, un battant toujours ouvert sur la campagne. Allongés sur son lit, il me racontait toutes les aventures qui lui arrivaient dés lors qu'il franchissait cette fenêtre de papier et j'y croyais. J'y crois encore.
Je me souviens de jouer à Intervilles dans le jardin ces samedis soirs d'été alors que mon père préparait le barbecue.
Sur le chemin des souvenirs paternels, je croise des samedis verts bûcherons, des dimanches brochettes, mille trajets vers l'école, d'abord assise à l'arrière et nos jeux pour faire oublier la destination, et plus tard, à l'avant, où la musique s'est partagée de bandes originales en comédies musicales, mais toujours la même angoisse au ventre au coin de la rue de l'école, de toutes les écoles où il m'a menée du Pas-de-Calais à Cambridge en passant par la Californie. Des images de lui sur les trajets des vacances, aspergé d'eau de Cologne. Je me souviens de ses mille pas les vendredis midis, sa patience toujours, les comptes dominicaux et l'odeur de l'argent. Mon premier dimanche. Je me souviens, tout là haut, perchée, une cabane. Je me souviens de son odeur rassurante de savon et de dentifrice lorsque je me glissais dans le lit parental le soir avant que maman n'ait achevé toutes ses tâches et ne vienne se coucher. Je me souviens avoir souvent dessiné des petits visages sur la plante de ses pieds et les éclats de rire à le voir les animer. Je me souviens de la maison de poupée qu'il m'avait bricolée et tapissée. Je me souviens d'un Papa mots croisés. Papa foot. Papa négoce. Papa charmeur. Je me souviens lui avoir écrit un merci pour cette étincelle de curiosité qu'il m'a laissée et qui m'a fait avancer, son élan vers le monde et son sourire à la vie
Je me souviens de ma mère.
Derrière ses pas, c'est le merveilleux qui s'ouvrait à moi. A ses côtés, les chuchotements des esprits de la nature se laissaient écouter, les jouets prenaient vraiment vie la nuit. Noël, Pâques, tous les anniversaires, des rendez-vous attendus auxquels elle donnait âme. Il y eut aussi tous ces petits plaisirs auxquels elle œuvrait au quotidien et qui rendaient la vie grande: Le petit train sandwich du goûter; les promenades à vélo, moi chantant à tue tête sur le porte bagages, un bouquet de fleurs des champs à la main; les après midi plage et les petits crabes en observation dans mon seau; aller aux mûres et le parfum des confitures. Je me souviens d'une maman aux doigts de fée qui me communiqua l'étincelle de la création. Esprit de la nuit qui terminait mes devoirs. J'entends encore le ronron de sa machine à coudre et revois le petit cercle de lumière ambrée qui éclairait son visage alors que sous ses doigts prenait vie mon Pierrot de chiffon.
Je me souviens m'être assise devant le sapin de Noël, un vrai sapin de senteurs qui perd ses aiguilles en cascade sur le carrelage dans un petit bruit de bâton de pluie. Je me perdais dans les reflets des guirlandes lumineuses projetés sur les décorations. je me souviens croire très fort au père Noël, de lui laisser un verre de vin et une carotte aussi, pour les rennes; d'avoir appris qu'en fait c'était ma mère qui goûtait le vin et mon père qui croquait la carotte.
Je me souviens de la magie de marie-rose et de la vie en chansons.
Je me souviens des bonheurs nature:
* poser les paumes de main sur l'écorce d'un arbre.
* suivre la sauterelle, l'abeille et le papillon.
* jouer avec les ombres projetées par le soleil.
* nourrir les canards au bord d'un étang.
* chercher des cailloux en forme de lettres.
* poser un nom sur une fleur, une herbe sauvage, un arbre.
* regarder défiler les nuages et écouter chanter le vent.

* ramasser des graines, des pommes de pin.
* admirer les champignons.
* humer.
* pique-niquer à l'ombre sur un coin d'herbe.
* se laisser emporter par la pente en courant jusqu'en bas d'une colline
* faire flotter des branchages sur l'eau d'un ruisseau.
* construire une cabane
* découvrir l'écho
* ramasser des marrons et les caresser en secret dans le fond de sa poche
* se faire charmeur d'escargot.
* surprendre un écureuil dans un éclair de fourrure rousse.
* arroser le jardin.
* s'asseoir dans les herbes hautes et n'avoir plus que le nez qui en dépasse.
* à plat ventre dans l'herbe, creuser la terre et découvrir l'échelle minuscule de la vie qui y fourmille.
* claquer des bottes dans une flaque.
* faire crisser la glace de la pointe du pied, la briser d'un coup de talon
* ouvrir le bouton d'un coquelicot
* cueillir des trèfles et des pissenlits pour les lapins
* grimper à un arbre.
* rêver devant un arc en ciel
* compter les points d'une coccinelle.
* admirer l'ouvrage de soie de l'araignée perlé de rosée
* voir tout un monde dans une goutte d'eau
* donner des graines aux oiseaux pendant l'hiver
* camper
*effleurer la douceur des pétales d'une rose
Je me souviens avoir voulu acheter des dizaines de livres poches avec l'argent de ma communion mais de pas être appuyée dans cette démarche.
Je me souviens avoir passé des heures enfermée dans la cabane au fond du jardin à lire, mais après de ne plus oser en franchir la porte à cause des araignées tapies dans les coins qui n'attendaient que de se jeter sur moi!
Je me souviens être allée à quatre pattes dans les placards de ma mère, bravant la menace arachnide, pour trouver un livre à me mettre sous la dent, d'en être réduite à lire des sélections qui ne sont que des condensés d'histoires.
Je me souviens Mon premier Barjavel à 16 ans, "l'enchanteur" et la révélation. Je me souviens avoir lu toute son oeuvre oubliée depuis.
Je me souviens avoir aimé bien des livres, racontés, lus, empruntés, achetés, imposés, offerts.
Je me souviens très bien que l'enfance est magique.
Mais je me souviens avoir parfois eu hâte de grandir.
... Je dévide la bobine à souvenirs et emportée par le fil je dépasse l'enfance ...
Je me souviens du ressac et du sel des jours.
Je me souviens avoir eu des envies d'ailleurs adolescente.
Je me souviens de l'appui paternel et enfin l'accord général pour le départ qui m'offrit le souvenir du parfum des nuits Californiennes toute une année durant.
Je me souviens d'un petit pendentif en forme de fer à cheval.
Je me souviens avoir longtemps guetté le facteur.
Je me souviens de ma première nuit d'Halloween.
Je me souviens des planches amateurs qui faisaient la vie grande.
Je me souviens que l'Amitié s'écrivait toujours avec une capitale de plus que l'amour. L'amour naissant, balbutiant, celui qui virevolte, qu'on veut épingler et qui fait quand même souffrir, tout leger qu'il fut, jusqu'à ce qu'arrive l'amour fusion.
Je me souviens alors de nous, passion, potion, poison, patience.
Je me souviens avoir jeté toutes mes lettres et gages d'amour adolescents il y a quinze ans pour laisser la place aux écrits de l'homme de ma vie.
Je me souviens qu'il m'a surtout écrit la première année.
Je me souviens que la trame de mes jours unit mes fils aux siens, que nous avons brodé notre passage de l'adolescence au jour présent côté à côté. Je me souviens qu'une grande part de celle que je suis aujourd'hui s'est nourri de lui et l'inverse aussi.
Je me souviens de tous mes voyages.
Je me souviens de mes racines
Je me souviens de mes rêves.
Je me souviens de tous les lieux où je me suis assoupie
Je me souviens de beaucoup de gens qui m'ont sûrement oubliée.
Je me souviens de l'amitié
Je me souviens d'une chrysalide pour deux papillons.
Je me souviens que la vie est riche en surprises.
Je veille, éveille, m'émerveille et me souviens que le bonheur se cueille aussi dans l'anodin quotidien.

Je me souviens, mais je ne suis pas certaine que ces souvenirs soient tout à fait fidèles à la réalité. Cette loupe posée sur le passé est un peu déformante. Cette loupe c'est mon cœur tout en battements. Ces souvenirs c'est mon aventure intérieure! Et je ne distingue plus trop ceux que j'ai vécu de ceux que j'ai tissé. Je me souviens, mais après, qui se souviendra? Entre les mains du temps mes souvenirs sont des grains de sable qui ne sauraient être retenus. Je les confie au mots, gardiens de la mémoire, et je les lance au vent. Je les libère au hasard du réseau où clignotent mille écrans. Je consigne, je partage, j'écoute et interroge. Mon coin de toile porte le nom d'un papillon. Envol!

 

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Commentaires
G
(omg les photos... *.*)
L
Ben euh si on a tout lu !<br /> Et même que je viens relire ;)
G
j'ai participé il y a quelques années à un atelier d'écriture d'une semaine où la règle était que tout ce que nous allions écrire devait être lu aux autres personnes de ce groupe. Nous avons fait cet exercice, j'ai eu la gorge serrée en écoutant les autres nous livrer leurs souvenirs et au moment de lire à mon tour j'ai commencé avec des trémolos dans la voix et j'ai fini par éclater en sanglots....c'est beau de se souvenir mais ça fait mal aussi parfois.<br /> Merci pour ce partage d'émotion :)
M
C'est une page d'écriture en perpétuelle ébauche en fait, elle murit et se transforme, elle se rêve et se partage.<br /> Faites moi signe quand la mémoire vous reviendra, j'ai envie de lire ça!
A
Super chouette mais pareil que nono, je ne pense pas avoir autant de souvenir... Neanmoins c'est un tres bel exercice... Je vais essayer...
MinutePapillon8
  • Ici demeurent mes petits papillons qui reflètent, tour à tour, mes belles envolées de bonheur et aussi parfois, mes petits froissements d'ailes...Nature, lecture, photos, animaux, cuisine, scrapbooking, musique, voyage, partage...LA VIE VIREVOLTE. Depus la
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